Ma position à propos des médicaments en psychiatrie
Il y a différentes manières de considérer les médicaments. Entre les estimer indispensables ou, au contraire, les refuser complètement, il y a de l’espace pour différentes positions plus ou moins raisonnables et plus ou moins militantes.
Comme on me pose régulièrement la question — généralement en termes de « vous êtes pour ou vous êtes contre ? » — j’y réponds une bonne fois pour toutes.
L’importance du travail sur soi
Lorsqu’on « n’est pas bien » sur le plan psychologique, il faut en premier lieu travailler sur soi. C’est un fait bien connu : « ce ne sont pas les choses qui rendent l’homme heureux ou malheureux, c’est l’opinion qu’il s’en fait ». Que ce soit un mal-être temporaire ou bien qui dure, on ne pourra jamais faire l’économie de se poser des questions sur soi, sur sa vie, sur son rapport avec les autres, avec le travail, avec la maladie, avec la solitude et ainsi de suite. Même — et surtout — si les choses se répètent, il est fondamental de se demander quelle est notre part de responsabilité et ce que nous pourrions faire :
- pour que les choses changent ;
- pour qu’elles ne se reproduisent pas ;
- pour supporter ce que nous ne pouvons pas changer.
Tout ce travail intérieur est indispensable. C’est le sens même et la raison d’être de la psychothérapie. Il n’existe aucun médicament qui puisse nous en dispenser.
L’utilité des médicaments
On peut se trouver, à l’occasion, pris dans de telles douleurs, dans de telles souffrances, aux prises avec des symptômes d’une intensité telle que nous avons de la peine à penser correctement, voire à fonctionner, tout simplement. Dans ces moments-là, s’il existe l’un ou l’autre médicament — quel qu’il soit — qui puisse alléger la souffrance, soulager les symptômes, nous aider à fonctionner psychologiquement et physiquement, alors il est probablement stupide — ou un peu « maso » — de ne pas y faire appel. Je ne suis pas de ceux qui pensent que la souffrance est indispensable pour grandir et progresser. Je pense que si la souffrance est là, elle nous invite à comprendre et à corriger des choses en nous et autour de nous. Au-delà de ça, il y a la souffrance inutile. Et celle-ci, autant faire ce qu’il faut pour l’alléger, fût-ce une prise de médicaments, à plus forte raison si ces médicaments n’entraînent pas de plus gros problèmes que ceux qu’ils sont censés corriger.
Les inconvénients des médicaments
Il n’y a aucun doute que toute prise de médicaments ne va pas sans inconvénient. Il peut y avoir des effets secondaires, il y a des phénomènes d’accoutumance et de dépendances qui peuvent entrer en jeu. C’est pourquoi il ne faut jamais prendre à la légère n’importe quel médicament. Je suis pour une prise raisonnée et limitée, aussi bien dans les doses que dans le temps. Mais si l’on décide de prendre un médicament, il ne faut pas non plus faire semblant de le prendre. Il y a une dose minimum efficace, en quantité et en durée. Je vois parfois des patients prendre des demis, voire des quarts de pastille, alors qu’il en faudrait prendre une entière, puis décréter que ça ne les aide pas. C’est un non-sens.
Je pense aussi qu’il faut veiller à ce que la prise de médicaments soit aussi simple que possible. Il faut éviter, autant que possible, d’avoir trop de médicaments différents en même temps. Sinon, on multiplie les effets secondaires, les possibilités d’interactions et, à un moment donné, on ne sait plus quel médicament aide à quoi, qu’est-ce qui fait quoi. Ce n’est jamais très bon d’en arriver là.
Et les médicaments phytothérapeutiques ? Et l’homéopathie ?
Je n’ai rien contre l’homéopathie. Bien au contraire, je considère qu’elle est souvent très utile. Mais je ne suis pas homéopathe. Par conséquent, si vous désirez un médicament homéopathique, je ne peux que vous recommander de vous adresser à un bon homéopathe.
Je prescris volontiers, en revanche, des médicaments phytothérapeutiques, plus précisément des teintures mères. Contrairement à ce que pensent certaines personnes, elles n’ont pas qu’un effet placebo. Elles ont un vrai effet pharmacologique, en plus d’effets énergétiques. Par conséquent, ce sont souvent des remèdes très utiles. Mais il en va des remèdes « phyto » comme des médicaments allopathiques : tel remède peut être très utile à telle personne et ne pas du tout fonctionner avec telle autre. C’est pourquoi je pense qu’il ne faut pas en faire une guerre de religion : si une personne ne désire pas de médicament allopathique et qu’un médicament « phyto » l’aide, il n’y a aucune raison de la pousser à prendre un médicament chimique. De même, si telle personne qui aurait besoin d’un médicament n’est pas aidée par les teintures mères, il serait stupide qu’elle se prive — en tout cas qu’elle se prive d’essayer — un médicament allopathique.
En conclusion
J’espère que vous aurez compris que :
- Je ne suis pas pour la prise de médicaments à tout prix, en particulier lorsque ce n’est pas indispensable. Cela sonne comme un truisme, mais il est utile de le préciser : il n’y a aucune loi, ni aucun principe médical qui puisse obliger une personne à prendre un médicament s’il elle ne le désire pas et surtout si elle peut améliorer son état psychique sans y avoir recours.
- Je ne suis pas contre les médicaments : ni contre les médicaments chimiques, ni contre l’homéopathie, ni contre la phytothérapie, ni contre aucune approche médicamenteuse raisonnée et pertinente, proposée par des thérapeutes sérieux.
- Je suis pour une évaluation raisonnée de la pertinence d’un traitement médicamenteux. Il est stupide de se priver d’effets potentiellement bénéfiques et, à l’occasion, il peut s’avérer indispensable d’avoir recours à un médicament, même allopathique.
- Ma raison d’être dans mon métier, c’est d’aider au travail intérieur, au travail sur soi. Si quelqu’un n’est pas intéressé à cela, alors il a meilleur temps de voir quelqu’un d’autre.
- Pour moi, les médicaments sont des aides, sans plus. Si une personne refuse ou n’est pas intéressée à faire un travail sur elle-même, si tout ce qu’elle souhaite c’est un médicament-miracle qui lui permette de régler ses problèmes, alors je lui demande de ne pas faire appel à moi. Je refuse d’être un « pur prescripteur ».
le 25 février 2022